Kuessipan signifie « A toi » en innu, langue amérindienne.
Dans ce recueil de textes très courts, parfois juste quelques lignes, Naomi Fontaine s’adresse à son peuple, mais aussi à chacun d’entre nous pour nous conter le village d’Uashat, un village parmi tant d’autres, au cœur d’une réserve nichée dans la nature omniprésente.
« Seule sur scène, elle chante la langue d’un peuple oubli é, comme un appel à l’aide, comme par modestie. La voix claire et l’âme belle, pour ne pas oublier. »
Par petites touches subtiles, l’auteur lève délicatement le voile avec dignité et respect, sur la misère, la relégation, l’isolement, tout ce qui fait mal ; mais aussi sur les espoirs, la beauté et la simplicité de l’existence, au cœur du grand nord canadien, là où « les choses vieillissent plus vite […] sans que personne ne s’en rende compte ».
Ces fragments d’histoires à peine esquissées, agencés les uns aux autres, les phrases sans verbe produisent chez le lecteur un état quasi-méditatif, une expérience de lecture unique.
« Une querelle de famille qui ne se réglera jamais, comment le fils demandera-t-il pardon au père ? Une poussière sur le cœur. Une ride sur le front. »
Une œuvre très originale, à savourer.
« Pourquoi. La nuit, elle dort d’un sommeil lourd qui lui enfouit le front jusque dans les dunes de son oreiller. Son visage tremble dans la noirceur de sa chambre close. Elle se raidit dès que quelqu’un hausse la voix. La peur la pourchasse dans ses cauchemars de mère. Elle pleure et personne ne la console. Elle rit.
Je voudrais lui dire que je sais. Pourquoi je me tais.
Le silence. Je voudrais écrire le silence. »