C’est un roman plein de grâce et de cruauté, un roman sur la beauté du monde, sur les oiseaux et les migrations, sur les hommes et la guerre qui les envoie au loin sans espoir de retour. Publié pour la première fois en 1982, le livre de l’auteur australien David Malouf est enfin traduit en français, rejoignant ainsi l’étagère des classiques contemporains atemporels.
Jim Saddler et Ashley Crowther n’appartiennent pas au même monde, pourtant ils étaient faits pour se rencontrer en ce début de 20e siècle. Ashley est un jeune et riche propriétaire australien du Queensland, un esthète qui a l’idée avant-gardiste de créer un sanctuaire ornithologique sur ses terres qui bordent le Pacifique. Pour répertorier les différentes espèces, il embauche Jim, qu’il soustrait à un destin d’ouvrier sans illusion. Ce dernier passe ainsi ses journées dans l’herbe, immobile, observant les oiseaux avec ses jumelles, s’émerveillant de leurs capacités migratoires et imaginant tous les ciels et les paysages fendus de leurs ailes puissantes. En consignant le nom et le comportement des oiseaux dans son cahier, Jim a le sentiment d’immortaliser l’éphémère. Mais cette vie paisible est bientôt brisée par le fracas de la guerre qui éclate en Europe à l’été 1914.
Jim s’engage comme soldat, Ashley sera nommé officier. Ils effectuent leur grande migration mais sans être sûrs du retour. Le premier rejoint Armentières où il combat jour et nuit dans les tranchées boueuses, avec les poux, les rats, au milieu des cadavres en décomposition. Autour, la mitraille, les obus qui tuent et mutilent en masse. Jim s’accroche au chant des oiseaux que la grande boucherie inédite dans l’histoire ne parvient pas à faire taire. Roman sur la fin de l’innocence, le chaos et la modernité, « L’infinie patience des oiseaux » possède un style poétique et lyrique, une lumière intrinsèque qui éclaire délicatement une réflexion profonde sur le temps et la transcendance. Un chef-d’œuvre traduit magnifiquement.