« La Dernière Vallée », roman de John Barclay Pick, a été publié pour la première fois en 1959 et vient d’être traduit en France. Adapté au cinéma en 1971 avec Omar Sharif et Michael Caine, il résonne de manière frappante avec notre époque contemporaine.
En cet hiver 1637, la Guerre de Trente ans fait rage en Allemagne depuis presque vingt ans. Née de l’antagonisme entre les princes protestants et l’autorité impériale catholique, et s’étendant à de grandes puissances étrangères, elle est essentiellement menée par des troupes mercenaires insoumises qui dévastent cruellement le pays. Vogel, un érudit qui fait cavalier seul, parvient, au terme d’une longue errance à travers des villages décimés par la peste, dans une vallée épargnée par la guerre et les maladies. Dans le même temps, une bande d’hommes menés par leur capitaine trouvent eux aussi le chemin de cette enclave fertile. La compagnie, bien décidée à y passer l’hiver, s’oppose aux villageois qui ne veulent pas de cette engeance parmi eux. Vogel, le sage étranger, propose alors un arrangement et un nouvel ordre social favorable à tous : en échange de la nourriture et du repos, les soldats s’engagent à assurer la sécurité des villageois. Personnage omniscient qui ne se revendique d’aucun camp, Vogel est le plus qualifié pour trouver des compromis entre le pragmatisme brutal des mercenaires et les croyances religieuses de leurs hôtes. Mais le temps passant, les tensions s’accroissent et Vogel apprend à ses dépens que sa neutralité le condamne. C’est aussi ce que lui enseigne le Capitaine cynique et taciturne, tourmenté par ses propres démons. Désabusé par la guerre et par les hommes, ce dernier est trahi de toutes parts : par les bourgeois et les prêtres d’un côté, et par ses troupiers de l’autre, qui piaffent à l’idée de retourner sur les champs de bataille où ils voient des opportunités d’enrichissement. La paix ne vaut alors plus rien contre la convoitise, il n’y a plus de bonne cause ni d’idéal à défendre, mais seulement des intérêts privés à préserver. Le fragile équilibre qui maintenait le village dans une paix relative est définitivement rompu lorsque Vogel, qui ne cherchait que le repos de son âme, tombe amoureux de la belle et fougueuse Inge, la fille d’un fermier promise à un autre.
John Barclay Pick a écrit un vrai roman historique passionnant et incarné grâce aux ingrédients du roman d’aventures. Son tour de force a consisté à mener une réflexion étonnamment moderne sur la paix et ses impossibles compromis à travers une fable mêlant vérité historique et romanesque épique.