Howard Jacobson, surnommé le Philip Roth anglais, se préfère en Jane Austen juif (cette phrase est merveilleuse !) (elle est de lui) (je précise) et est également l’auteur de l’excellent La question Finkler (que je vous recommande chaudement).
Ce roman-ci, c’est comme une pelote de laine reconstituée à partir d’un ouvrage détricoté : à première vue, ça semble un peu hétéroclite avec çà et là quelques endroits qui dépassent un peu, c’est pas super bien rangé et on pourrait croire que ça va être moins bien. Mais le matériau se révèle d’une solidité à toute épreuve, et pour peu qu’on ait été soigneux, on n’est pas à l’abri d’une bonne surprise… Par courts chapitres aux titres clin d’oeil, c’est la vie de Guy Ableman qu’on nous invite à découvrir; écrivain édité (mais peu goûté), il nous dévoile généreusement ses opinions sur le livre au sens très large, et sur tout ce qui tourne autour : les écrivains (il/elle), le Verbe, les mots, les lecteurs (ou pire, les lectrices), les non-lecteurs, les éditeurs, attaché(e) de presse, j’en passe, vous avez compris l’idée. Guy a par ailleurs une épouse (spéciale), une belle-mère (canon), des parents (déments), un frère (particulier), ainsi qu’un sens de l’humour à toute épreuve, et une immense distance – tout autant qu’une farouche tendresse (Guy est très complexe, comme garçon) – pour sa judéité. On rit en lisant ce roman, c’est indéniable, et j’aime ça. Mais ce que j’ai préféré c’est la manière très fortiche de l’auteur de construire à travers cette navigation louvoyante une vraie histoire (bien qu’il en ait…), et de nous offrir un épilogue éclairant l’ensemble d’une tout autre couleur, gorge qui se serre et tout. Quelques morceaux un poil rugueux pourront, je le crains, désarçonner les adeptes du lisse, ce fut un grand coup de coeur pour moi ! (Et bravo au traducteur pour le respect du rythme (très stand-up) et les jeux de mots parfaitement transposés !)