Roopa Farooki m’avait séduite avec Le Choix de Goldie, et les Editions Gaïa avec leur qualité d’édition/papier et traduction qui sont toujours un régal à lire.
Je ne savais pas qu’un nouveau roman d’elle sortait jusqu’à ce que je pose la main dessus à ma librairie, l’oeil autant attiré par le nom de l’auteur, que le titre et la couv, pleine de poésie et d’enfance.
Car il est bien question d’enfance dans ce roman. D’enfance « ratée », du moins « perturbée » par l’arrivée d’une petite troisième, une soeur prénommée Yasmine, atteinte du syndrome d’Asperger, en d’autres termes, autiste.
Sans pathos mais avec franchise, le grand frère, Asif, et la grande soeur, Lila, donnent leurs sentiments face à cette soeur « vampirisante » dont ils ont eu à s’occuper à la mort de leurs parents. Ainsi que leur vécu avant et après le diagnostic, les injustices/le favoritisme ressentis, leur mère accaparée et usée… tout ce qui ne se dit pas d’ordinaire. Le rejet, l’aigreur et les responsabilités qui rejaillissent sur la vie d’adulte, l’amertume mais aussi l’amour, et la vie qui gagne.
Yasmine livre également son point de vue, du haut de son syndrome, avec parfois des manques ou des trop-pleins d’informations. Car elle est autiste savante et une équipe de télévision a décidé de faire un reportage sur elle, afin de sensibiliser les gens à son syndrome. Pour elle il y a le monde des neurotypiques et les autres. Elle se sait très intelligente mais elle sait aussi que certaines notions de délicatesse/règles sociales lui échappent. Alors elle tente de dévoiler son monde, parce qu’elle le peut.
« Je suis spéciale et ma maman m’a appris que c’est de la responsabilité des gens spéciaux d’aider les autres à les connaître mieux. »
Un livre intelligent, fin, sur la différence et ses impacts sur la fratrie, et, malgré le sujet, pas du tout plombant; en partie grâce à des passages qui peuvent sembler un peu mièvres mais restent touchants grâce aux personnages qui sont tous attachants.
« A cause de Yasmine, Asif n’était jamais allé dans un vrai restaurant avant d’aller à l’université.Et la première fois, lorsqu’il se rendit avec des amis dans un restaurant italien sans prétention, il dut se retenir de débarasser la table et d’empiler ses assiettes comme à la maison. L’argument de leur mère était toujours le même: si Yasmine n’aimait pas quelque chose, le reste de la famille n’en profiterait pas vraiment. C’était sensé, mais ça n’aidait pas, pas vraiment. »