Madeleine St John a franchi la cinquantaine, tire le diable par la queue, vit dans un logement social de Londres, se promène avec sa bonbonne à oxygène (elle souffre d’un emphysème) ET son paquet de cigarettes, lorsqu’elle se lance dans l’écriture de ces « Petites robes noires » en 1993. Très cultivée, travaillant par intermittences chez un libraire, elle ne voit par pourquoi elle n’arriverait pas à surpasser les niaiseries qui sont publiées à longueur d’années. C’est ainsi que ce premier roman, une petite merveille de perspicacité, d’humour et de distance, verra le jour. L’intrigue est ténue en apparence, mais en apparence seulement. Car une fois le livre refermé, on s’étonne du nombre de réflexions qu’elle a réussi à glisser à travers la destinée de ces vendeuses du rayon prêt-à-porter et haute couture du grand magasin le plus chic de Syndey, Goode’s. Il y a d’abord Lesley, surnommée Lisa, la jeune intérimaire et le personnage le plus proche de l’auteure. Cette jeune fille brillante rêve d’aller à l’université alors que son père n’en voit vraiment pas l’utilité. Mais ce « petit boulot » qu’elle accomplira pendant les fêtes de Noël, lui ouvrira les portes insoupçonnées d’un avenir qui s’annonce radieux. Et puis il y a Magda, la belle Slovène qui a dû fuir son pays ; Patty qui n’a pas trouvé le mode d’emploi pour faire des enfants ; Fay aux histoire sordides, et tout cela sur fond de froufrous, de robes aériennes, de nuisettes en soie et autres merveilles.
Décédée en 2006 à l’âge de soixante-cinq ans, Madeleine St John aura quand même eu le temps d’écrire trois autres romans dont le dernier, « Rupture et conséquences » est en cours de retraduction, la précédente n’ayant apparemment pas plu à l’auteure lorsqu’elle a paru. Talentueuse, mais pas commode Mrs St John!