Neverhome
Laird Hunt

ACTES SUD
septembre 2015
256 p.  22 €
ebook avec DRM 7,49 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Une femme au coeur de la guerre de Sécession

Le romancier américain Laird Hunt, déjà remarqué l’an dernier pour Les bonnes gens, roman dans lequel il abordait le thème de l’esclavage, signe cette année un des textes les plus émouvants de l’automne, Neverhome. Dès les premières lignes, la voix d’une femme d’un autre siècle nous attrape, et une fois le livre refermé elle nous hantera longtemps. C’est la voix de Constance, qui du fond de sa ferme de l’Indiana nous raconte sa drôle d’histoire. Lorsqu’elle était toute jeune, durant la guerre de Sécession, elle s’est habillée en garçon pour aller combattre.

Ce personnage exceptionnel se souvient de tout cela avec des mots très simples, et une douleur infinie. Alors qu’elle combattait, chaque jour elle pensait à son mari qu’elle avait laissé seul, là-bas dans leur ferme de l’Indiana. C’est pour le protéger qu’elle est partie à sa place, parce qu’elle savait mieux tirer que lui. Autour d’elle, le champ de bataille tourne à l’horreur, et elle vit dans la peur d’être découverte.

Ce texte magnifique, d’une rare intensité, surprend par son actualité. Au contraire d’une reconstitution en costumes, Laird Hunt aborde des problématiques toujours présentes aujourd’hui, aux Etats-Unis comme ailleurs: la violence, le racisme, mais aussi la place des femmes dans la société.

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 Les internautes l'ont lu

Pas très loin du coup de coeur

J’ai découvert ce roman quelques jours avant sa parution officielle, c’était lors de l’Intime Festival de Namur en août dernier. Laird Hunt était présent pour une rencontre. Une belle découverte, une plume magnifique qui m’a bouleversée lors des lectures.

Nous sommes pendant la guerre de sécession. Dans sa ferme de l’Indiana, Constance et Bartholomew coulent des jours heureux jusqu’à ce que Bartholomew soit appelé à rejoindre le rang des Confédérés. Constance se sent plus forte et prendra sa place. Comme trois à quatre cents femmes de l’époque, elle ira travestie en homme, un grand chapeau sur les yeux combattre sous le nom de Ash Thompson.

Elle s’entraînera et prendra le chemin de la guerre. Un surnom et une chanson l’accompagneront ; « Gallant Ash » parce qu’elle aura grimpé au sommet d’un arbre, abandonnant sa veste à une jeune fille dont la chemise était déchirée.

On s’identifie très vite à elle dans la lecture, s’adressant à nous à la première personne et nous livrant une confession écrite des années après cette guerre. Elle raconte son quotidien, la dureté de la guerre, la faim, les champs de bataille, les champs de cadavres. Elle l’écrit dans des lettres à son bien aimé, en gardant en elle les images du bonheur, de sa ferme, le parfum du carré de menthe, son mari.

Les atrocités vécues nous sont livrées avec justesse et dureté atténuées par les descriptions de la nature décrite en finesse et poésie. Très vite on craindra qu’elle soit démasquée. C’est une femme de caractère et de courage notre Constance ou Ash, un fin tireur qui sait ruser pour se tirer d’embarras.

Elle perdra son régiment et repartira en quête d’un chez elle, à la recherche de son régiment, de son amant…

Des personnes s’intéresseront à elle : le colonel, Neva Flatcher…. J’ai aimé mais dans le dernier tiers, je me suis un peu perdue…La magie des mots n’opérant plus à part entière, difficile de vous dire pourquoi, probablement parce que que j’aurais aimé cerner un peu plus ses motivations. Laird Hunt a voulu nous raconter plusieurs histoires de femmes ayant vécues la guerre de sécession, j’ai l’impression que des fils se sont emmêlés….

La plume est forte, puissante, intense. Les courts chapitres sont très forts. La description de l’horreur est nécessaire et juste, elle est ponctuée par des respirations poétiques, imagées, nostalgiques de la terre natale de Constance et cela fonctionne à merveille.

Ma note : 8.5/10

Les jolies phrases

Morte au monde comme un jour sans lumière et lente à revenir.

Si on passe assez de temps assis sur une chose on se met à être cette chose, et elle, elle se met à être vous.

On croit qu’on ne rentrera jamais et on se retrouve là à se demander si on est jamais parti!

Ce qui m’intéresse, dit-il, n’est pas votre motivation pour le service, car le service est à lui-même sa propre et digne réponse, mais l’habilité avec laquelle à vous seul, vous vous êtes extirpé de ce pétrin, vous et vos compagnons.

Les larmes montèrent le long de leurs canaux mais sans pouvoir se frayer un chemin à travers les couches de crasse qui avaient durci mon visage.

Où que l’on posât les yeux, ce n’étaient que blessés. Toute la douleur de ce monde et du monde d’après.

Les autres iraient s’asseoir dans la cour offrir au vent la sagesse tirée de leur mauvaise fortune.

Je voulais juste me battre. Planter mon talon dans le sol, tenir bon et ne jamais m’enfuir.

On peut pas aller plus loin du monde que les frontières sinistres de l’au-delà.

Il y a l’abri et l’idée qu’on se fait d’un abri. L’idée, vous pouvez bien vous réfugier dessous, vous vous ferez tremper quand même.

Vous ne ferez de mal à personne, dit la femme. Pas moyen. Pas ici. On ne peut plus avoir mal. On est au-delà de ça. Peut-être que c’est nous qui allons vous faire du mal.

Le bruit d’une armée qui se prépare au sommeil est terrible. Il est à la fois puissant et discret. On ne peut pas aimer quelque chose qui est les deux.

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