Un visage d'ange
Lisa Ballantyne

Traduit par Anne Sylvie Homassel
BELFOND
juin 2013
393 p.  22 €
ebook avec DRM 14,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
nuit blanche

Peut-on faire le procès d’un enfant ?

Attention, ce livre se lit d’une traite! Il est de ceux qu’on ne lâche pas avant d’avoir atteint la dernière ligne. Vous voilà prévenu !

Est-ce le sujet qui nous happe ainsi ? Sans doute l’incrédulité que l’on éprouve à la lecture du crime dont il est question et de l’auteur qui est supposé l’avoir commis y est-elle pour quelque chose: Sebastian, 11 ans, est accusé d’avoir assassiné Ben, de 3 ans son cadet.
On se refuse à croire qu’un enfant puisse tuer un autre enfant et l’on attend que la conclusion du récit nous confirme que c’est chose impossible.
Le comportement de l’enfant nous trouble. On comprend très vite que son existence n’est pas exempte de douleur. Il connaît la violence, il la côtoie au quotidien au sein de sa famille. Mais cela suffit-il à le rendre lui-même coupable et capable d’un tel acte de barbarie ?
La violence domestique et la faiblesse de sa mère suffiraient-elles à expliquer l’acte qu’on l’accuse d’avoir commis ?
L’image que renvoient de lui les gens qui le connaissent correspond-elle à la réalité ? Ou bien n’est-elle qu’une vision parcellaire et déformée de sa personnalité ?
Ses attitudes et ses gestes trahissent-ils vraiment une personnalité trouble ou bien ne sont-ils que des épisodes isolés qui témoignent de la détresse émotionnelle d’un petit garçon qui aurait besoin d’être tenu à l’écart de ses parents ?

Comme pour accompagner tous ces questionnements, le récit alterne le développement de l’enquête et la préparation de la défense avec les souvenirs que cette affaire fait remonter à la mémoire de Daniel, l’avocat de Sebastian. Lui-même aurait pu connaître un sort comparable à celui de « son client ». Fils d’une toxicomane, il a, dès son plus jeune âge, souffert de la défaillance de sa mère. C’est lui qui appelait les secours lorsque sa mère faisait une overdose; lui encore qui s’interposait entre elle et ses compagnons successifs lorsque ceux-ci la frappaient, quitte à pisser de trouille dans son pantalon… Et lorsqu’il lui fut arraché pour être confié à des familles d’accueil, sa rage d’être séparé d’elle s’exprimait à travers des fugues et de violents accès de colère. Seule une femme a réussi à le sauver de lui-même. Minnie a su trouver les mots et les gestes pour lui faire comprendre que malgré la situation, il avait les moyens de construire sa propre vie; elle lui a donné l’amour et la confiance dont il avait tant besoin. Ce faisant, elle a peut-être commis une erreur en l’obligeant à tourner définitivement le dos à son passé…

Alors oui, on dévore ce livre pour avoir les réponses à toutes ces questions. On veut à toute force savoir comment ces être écorchés par la vie parviennent – ou pas – à prendre le dessus.
Mais le fait que Sebastian soit coupable ou non est-il si important, dans le fond ? Qu’un enfant comme Sebastian ou comme le jeune Daniel ait pu ou non se rendre coupable d’un meurtre ne dépend-il pas avant tout de l’attitude de ses parents ? De la capacité de ceux-ci à lui procurer une stabilité affective qui lui permette d’affronter la vie.
Pourtant, la justice anglaise voit les choses autrement. Dès les premières pages du roman, on est effaré par le traitement réservé à l’enfant présumé coupable. Il est mis en cellule et interrogé par la police comme le serait n’importe quel adulte. Ce que dénonce l’auteur, c’est que l’on puisse rendre un enfant responsable de ses actes sans aucune considération pour son âge. Lysa Ballantyne s’élève contre le système judiciaire anglais qui considère qu’un enfant de 10 ans peut être tenu comme pénalement responsable. C’est sans doute là tout le sujet de son livre.
A travers le récit poignant et haletant du destin de Sebastian et de Daniel, elle dresse un violent plaidoyer qui touche au plus profond du lecteur.

Retrouvez Delphine-Olympe sur son blog 

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