Un nouveau roman de Ian McEwan, c’est irrésistible en soi pour qui a déjà eu l’occasion d’en lire un, quel qu’il soit; non pas que TOUS les romans de Ian McEwan soient parfaits, ça n’existe pas et même, on peut ne pas apprécier plus que ça certains de ses romans. Ce qu’on ne peut prétendre, en revanche, c’est qu’on s’y ennuie ou qu’ils soient bêtes. Tous ne nous touchent pas de la même façon mais tous sont pétris d’intelligence et disent quelque chose de leur époque et de leurs contemporains.
« Il tenait à Miranda de la même façon qu’un lave-vaisselle tient à ses assiettes. »
Pour aborder le thème de l’intelligence artificielle, Ian McEwan développe un vrai roman de Science-Fiction, plaçant d’entrée de jeu une uchronie : nous sommes au début des années 80 et ni Alan Turing ni les Beatles n’ont raccroché les gants. Récemment mis sur le marché, mais encore très onéreux, deux modèles d’intelligence artificielle sont en test, douze Adam et treize Ève.
« On trouve un certain répit dans la sensualité d’un lit rien qu’à soi, pendant quelques temps du moins, jusqu’à ce que le fait de dormir seul acquière sa propre tristesse muette. »
Charlie aurait aimé acquérir une Ève mais c’est un Adam qu’il ramène à la maison, qu’il entreprend de configurer avec sa voisine du dessus, Miranda, qui deviendra bien vite son amoureuse. Ensemble, ils vont faire l’expérience de cette parentalité d’un nouveau genre…
« Je m’approchai, comme avant moi des millions de gens s’étaient approchés d’une personnalité dans un lieu public, avec cette humilité apparente qui masque le sentiment de légitimité conféré par une admiration sincère. »
C’est un roman que j’ai trouvé étrange car il m’a semblé à plusieurs endroits renoncer à une bifurcation un temps envisagée, ou c’est peut-être moi qui me suis sentie désarçonnée par des formulations un peu absconses. Charlie est un poil ennuyeux, mou, je ne l’ai pas toujours très bien suivi dans ses considérations politiques, d’ailleurs je me suis un peu perdue dans les modifications sociétales par rapport à la réalité, et surtout ce n’était pas ce que je souhaitais lire. Beaucoup de péripéties annexes au thème central, celui qui m’intéressait le plus, qui n’en demeure pas moins bien traité. Et puis évidemment ces petites perles disséminées un peu partout, des pensées comme ça qui font mouche. On ne sait toujours pas si les robots rêvent de moutons électriques mais leur tristesse en revanche nous devient palpable, et on referme ce livre avec des dizaines de sujets à approfondir.
(*Kipling)