La narratrice, une jeune femme dont on ne connaît pas le nom, a grandi dans l’antre des femmes. Un lieu clos de murs fermé par de lourdes portes de bois. Un endroit où on suffoque, où on peine à respirer. On y geint, on y crie son désespoir, on s’y tait aussi par épuisement. Les femmes qui vivent dans cette maison n’y sont pas venues de leur plein gré, on les a envoyées de force, avec violence et méchanceté, au nom de traditions religieuses et patriarcales. Elles ont fauté (la plupart du temps il ne s’agit que de suppositions, rarement de faits réels), on les punit, on les condamne. On les met à l’écart du monde, on les emprisonne, on les laisse ainsi à leur sort, avec leur chagrin. Durant des mois, des années, ces femmes-là ne sont plus que l’ombre d’elles-mêmes. Elles n’avancent plus, leur vie est arrêtée, seule une lueur d’espoir vacille encore en elles : que leur maître, leur mari, revienne les chercher.
La jeune femme est ici avec sa mère. Elle a toujours vécu auprès d’elle, elle ne connaît rien d’autre. Les jours défilent parfaitement identiques. Les femmes hurlent, pleurent, se lamentent. Elle entend leurs voix qui s’élèvent, elle écoute leurs confidences. Sa mère qui est un peu la mère de toutes ces femmes est pour elle si distante, si indifférente. Comme les autres, elle attend son mari, sa délivrance. Sa fille semble transparente à ses yeux.
Toute son enfance, elle a espéré un geste, un signe, un regard. Rien.
Alors quand la mère disparaît, que le lien se rompt définitivement, la jeune femme se met en quête de celui dont elle a tant entendu parler, son père. Elle ose franchir la porte de leur prison. Elle s’échappe, inspire l’air du dehors, fuit loin de la maison qui l’a abritée pendant des années du monde extérieur. Elle part sur les traces de son père. Sans haine, sans reproche ni demande, elle veut juste rencontrer son père, le voir, le sentir, le toucher, lui sourire, lui dire… Mais quel accueil va-t-elle avoir dans l’antre du père ?
Un roman poignant, qui prend à la gorge. Une tension soutenue jusqu’au dernier mot. Une atmosphère très (peut-être trop) oppressante. Et puis, une vague lumière dans l’obscurité.
Retrouvez Nadaël sur son blog