Captivant, dépaysant, habile, « Bleu Calypso » de Charles Aubert est une plongée perfectionniste dans un polar abouti. L’incipit : « Le kayak avait une dérive idéale. » enclenche une histoire dont le déroulé fusionne avec la nature. Il y a dans les lignes la teneur de Henry David Thoreau. « Un homme est riche de tout ce dont il peut se passer. » Niels, le principal protagoniste est un homme encore jeune qui a tourné le dos au monde consumériste. Vivant de peu, pêcheur écologiste, fabricant des leurres tels des objets d’art. Il est Diogène sur un kayak emblématique. « Tu devrais sortir plus souvent de ta cabane et pas seulement pour aller à la pêche. » Niels va être confronté à la réalité. Des meurtres en série, des enquêteurs aux abois. Son monde s’écroule comme un jeu de cartes. L’écriture est salvatrice, douce, aérienne, à l’instar de ce bleu calypso. L’histoire riche de cette humanité existentielle est attentive à autrui dans un parfait langage hédoniste, malgré l’évènementiel rugueux et imprévisible. Niels sera son propre sauveur. Il faudra du temps, de la saveur grammaticale, des regards et des quêtes pour atteindre la rive rédemptrice. « Bleu Calypso » ne mène jamais le lecteur à la dérive des doutes. Ce dernier est un polar maîtrisé à l’extrême mais les nuances sont philosophiques et ouvrent la voie vers cette intelligence dont l’auteur détient les secrets. « Ce printemps dans ma cabane, Absolument rien, Absolument tout. » « Yamaguchi sodo. »Lire « Bleu Calypso » c’est apprendre à fabriquer un leurre métaphorique. Majeur. Publié par Les Editions Slatkine & Cie « Bleu Calypso » est en lice pour le Prix Hors Concours 2019 Gaëlle Bohé et c’est une grande chance.