Bye bye Elvis
Caroline de Mulder

Actes Sud Editions
romans, nouvell
ao?t 2014
284 p.  20 €
ebook avec DRM 14,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

La fin d’un mythe ?

J’avais lu avec beaucoup d’intérêt « Ego Tango », Prix Rossel 2010, à l’époque le premier roman de Caroline De Mulder. J’en garde une écriture particulière, un style hors du commun. « Nous les bêtes traquées » attend son tour dans ma PAL. Lorsque « Bye Bye Elvis » est paru, il m’a semblé tout naturel de le lire. L’originalité et l’écriture particulière sont toujours de mise; j’ai vraiment apprécié.

Le livre met en parallèle deux destins; celui d’Elvis et d’un vieil américain John White.

Ce roman est une biographie fiction qui débute à Graceland le 16 août 1977. Le roi du rock vient de s’éteindre et des millions de fans veulent lui rendre un dernier hommage. C’est à ce moment qu’Yvonne, qui vient de perdre son mari, sonne à la porte de John White, un vieil américain excentrique. Elle rentrera à son service pour le soigner.

Chapitre après chapitre, nous basculerons alternativement d’un homme à l’autre, une gymnastique un rien perturbante au départ que l’on oubliera bien vite par la force de l’écriture, aussi bien pour l’un comme pour l’autre, même si la vie du King et l’écriture un peu « rock » m’ont un peu plus passionnée et donné l’envie d’avancer plus vite. Mais on se rendra compte un peu plus tard que les deux parcours sont indissociables.

Je ne suis absolument pas fan d’Elvis, mais j’avoue qu’en cours de lecture mon intérêt pour le personnage n’a fait que grandir. Au delà de l’aspect largement connu du grand public, Caroline De Mulder s’attache surtout à la personne « intérieure », sa grande solitude et déconstruit avec brio le mythe, la légende.

Ce beau jeune homme gracieux qui quitte la pauvreté pour la gloire, qui devient une superstar en un temps record. Il mettra vingt années pour se détruire et dépérir. Il restera à tout jamais l’enfant orphelin qui ne s’est jamais remis du décès de sa mère. Sa gloire le transformera physiquement et moralement, ses transformations physiques exprimant sa solitude et son mal être. Cette question sans réponse qu’Elvis a dû se poser continuellement : était-il aimé pour lui ou pour l’image qu’il représentait?

J’ai aimé et trouvé intéressant la construction du roman sur cet homme enfant qu’il est resté toute sa vie, pris au piège de son image, d’un manager avide qui lui faisait faire n’importe quoi, navets au cinéma, chansons sans goût parfois, pour le plaisir de ses fans, de toute une armée de personnes à ses basques et à son portefeuille, une famille pas très top qui profitait de ses largesses. Lui qui voulait à tout prix être aimé.

…car la pauvreté, ça vous poursuit sous forme de parents faméliques, de parasites, de piques assiettes qui portent votre nom.

Comment rester soi-même si on est fragile, je n’ai pu m’empêcher de mettre son destin en parallèle à celui d’un autre roi, celui de la pop, Michael Jackson.

A côté de tout cela, Yvonne soigne et accompagne ce mystérieux John White. Un américain fragile, bizarre, dont le corps est détruit, malade. Très riche au départ et puis sans le sou par la suite. Quel est donc le lien mystérieux qui l’unit à Elvis. L’un est la lumière, l’autre l’ombre. Yvonne est sous son emprise, son esclave.

« Pour lui, j’étais sa mère, en moins jeune. Dans la vie, j’étais son ombre, sa main droite, j’étais ses yeux et, de plus en plus souvent, sa tête. J’étais sa voix quand nous sortions. J’étais son pilulier. Sa canne. Sa montre. Quand j’ouvrais les tentures j’étais le soleil, et j’étais la nuit quand je les fermais. Son nid quand je le bordais. Mais pour moi il était quoi au juste. »

Deux parcours attachants, une belle découverte de la rentrée.

Ma note 8/10

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