La rédaction l'a lu
Filles de la forêtMonica Sabolo fait de la forêt le territoire symbolique de l’adolescence : sombre, fragile, protectrice et dangereuse, c’est aussi le lieu des transformations, de l’éveil des consciences et des rites d’initiation. Le roman se situe dans une réserve amérindienne du nord de l’Amérique où s’opposent deux clans : ceux qui protègent et respectent l’écosystème et ceux qui le massacrent. Dans cet environnement menacé par les exploitants forestiers blancs, les autochtones perdent peu à peu du terrain. Parmi eux, la lycéenne Nita, qui vit avec sa mère à la lisière des bois, lieu de disparitions de jeunes filles du coin et du père de Nita elle-même, avalé lui aussi par la forêt trois ans plus tôt. A la fin de l’été, un père et sa fille emménagent dans la maison voisine. Lucy et Nita se retrouvent dans la même classe sans être amies, car Blancs et autochtones ne se mélangent pas. Pourtant toutes deux sont à l’âge des mêmes expériences transgressives : alcool, cannabis, sexe… Avec sa copine Kishi, Nita fait du stop pour se rendre les soirs de fins de semaine au Hollywood, un bar tenu par cinq femmes qui accueille essentiellement des travailleurs de l’exploitation forestière et gazière. Les serveuses fascinent Nita, qui rêve de faire partie de leur clan mystérieux et puissant ; mais l’adolescente est aussi attirée par la secrète Lucy qui tente de l’entraîner à la poursuite des esprits de la forêt. Lucy est différente, elle « fait des trucs », attire les garçons et provoque les médisances des filles. Un jour, elle disparaît à son tour, victime d’un viol. Pendant que la police enquête, Nita se révolte. Les esprits de la forêt sont prêts à se venger, à venger l’une des leurs, âme pure et innocente que les mâles ont abîmée comme ils saccagent la forêt à coups de tronçonneuses. Les animaux, la forêt, les jeunes filles, tout se mêle en une sorte d’écoféminisme qui assimile l’oppression des femmes à la destruction de la nature, avec pour ennemis communs le patriarcat et le capitalisme. A la fois inspirée par Joyce Carol Oates et Laura Kasischke, Monica Sabolo, dans une écriture poétique et sensible, réussit à édifier une atmosphère envoûtante, et parle magnifiquement du paradis perdu, de l’adolescence qui éprouve les premiers enjeux sociaux et la domination des puissants sur les minorités.
coup de coeur
« Eden » de Monica Sabolo
Les internautes l'ont lu
coup de coeur
J’avais découvert Monica Sabolo, il y a deux ans, avec son précédent roman « Summer ». |
|