Devant l’ignorance abyssale qui est la sienne – et qu’il explique par les conditions socio-économiques de son Limousin natal, condamné parce que les terres y sont moins bonnes et ne produisent pas un blé qui puisse supporter la concurrence des plaines de la Beauce à un déclin irrémédiable – et que l’enseignement scolaire ne comble pas mais recouvre d’un savoir abstrait qui ne lui permet de comprendre le monde dans lequel il vit, Bergounioux, avec un zèle de néophyte, se lance dans la tâche infinie d’en réduire la profondeur.
Ainsi pour la gélogie. Recherchant à comprendre les choses, il pense – et il a philosophiquement raison – qu’il doit en connaître le fondement, le fondement le plus concret, le sol, en l’occurrence. Quel est-il ? Quelle est son histoire ? Quelles en sont les différentes variétés qui sont ici même visibles ? Et le voila parti en chasse, dès qu’il a un moment de liberté, Bergounioux ne fait rien à moitié. Les sols, pense-t-il, l’ont fait ce qu’il est, ses humeurs, ses joies, ses tristesses. Il doit y avoir un lien. Le trouve-t-il vraiment ? Il accumule des fragments de roche, des fossiles. Jusqu’à ce qu’il lise un bouquin qui apporte des éléments de réponse aux questions qu’il se pose et par quoi il aurait dû commencer, mais le malheur des autodidactes est qu’ils ne savent justement pas par où commencer, d’où une perte de temps et d’énergie considérable.
Mais qu’importe, un autre sujet d’émerveillement s’offre à lui et d’inépuisable questionnement : un papillon vert ! Et le voilà qui se lance dans l’étude des lépidoptères. Ce que gagne Bergounioux à cette quête interminable ? Des mots pour dire le réel.
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