critique de "Histoire d'Adrian Silencio", dernier livre de Eléonore Pourrait - onlalu
   
 
 
 
 

Histoire d'Adrian Silencio
Eléonore Pourrait

Lattès
août 2019
423 p.  19,90 €
 
 
 
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« Histoire d’Adrian Silencio » de Eleonore Pourriat
est le coup de coeur de La maison de la presse de Caussade
dans le q u o i  l i r e ? #79

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Au cœur de la famille de Cléo

Pour son premier roman « Histoire d’Adriàn Silencio », Eléonore Pourriat nous entraîne au cœur de la famille de Cléo, de son passé qui fait souffrir les vivants au point d’en rendre un certain nombre étranger à leur vie. C’est un cartable en cuir et son contenu qui va révéler au fil d’une enquête minutieuse, solitaire et intense les fils ténus qui entourent la vie de son grand-père.
Cléo est une femme qui a la trentaine passée, aimant les mots puisque traductrice, qui décide d’en savoir plus sur son histoire familiale. Mais comme toute famille, la sienne a ses secrets que chacun décide de ne pas évoquer de peur de blesser la génération précédente. Il semble que ceux-ci commencent autour du punch franquiste lorsque son grand-père musicien décide de s’exiler et de se réfugier en France.
Il faudra son propre exil aux États-Unis pour que Cléo ose se saisir des éléments contenus dans le cartable, qu’elle les dissèque pour refaire le parcours de cet homme qui ne revient plus jamais en Espagne, s’installe en France définitivement sans jamais en demander la nationalité, fonde une famille sans se marier avec la mère de ses enfants et continue à voyager selon la bohème de son groupe de musiciens dans une Europe à feu et à sang puis au gré de ses contrats saisonniers.
Puis, il se fixe à Paris et sa famille se construit entre colères, tendresse et silences. Car, »l’homme droit » ne parle jamais de sa situation, « jamais, jamais, jamais, jamais » et personne n’ose lui demander quelque chose, « jamais, jamais, jamais, jamais ».
Pièces par pièces, Cléo les confronte pour reconstituer le puzzle de la vie de cet homme qui a connu la guerre civile espagnole, guerre fratricide jusque dans sa famille, et la prise du pouvoir par Franco. A l’inverse de son jeune frère Nando, qui est parti avec la Rétirada, Adriàn a préféré s’exiler dès les premiers signes.
Eléonore Pourriat convoque les mots pour décrire cette immersion solitaire et volontaire, pour soulager les silences de trois générations et pour énoncer les doutes, les incertitudes et la culpabilité ressentie à vouloir remuer un passé que toute une famille refuse de savoir.
L’autrice analyse aussi les ressorts de l’exil. En établissant un parallèle avec la situation de Cléo, exilée volontaire aux USA, et son grand-père, exil subit, elle en énonce les possibilités offertes mais aussi, entre autres, certaines limites par rapport à la famille restée dans le pays, les liens qui se délitent et la culpabilité de ne pouvoir être là lorsque c’est nécessaire. Mais, « jamais, jamais, jamais, jamais », Adriàn ne parle !
Est-ce que Cléo aura satisfaction dans sa quête ? Pas question d’en révéler davantage…
Les deux tiers du roman sont consacrés à la recherche. J’ai pris cette lecture comme une enquête généalogique ou policière, relevant les indices concernant l’entourage proche, reprenant les dates et les situations. Ma façon à moi de ne pas me laisser submerger par le mal être de Cléo que l’autrice décrit très bien.
Femme d’images, Eléonore Pourriat convoque la littérature pour donner du sens au passé de son héroïne tout en côtoyant les fantômes du franquisme et la solitude de l’exil de celui qui le choisit pour survivre. Roman autobiographique ou non, « Histoire d’Adriàn Silencio » est une enquête réussie faite de douleur et de souffrance pour retrouver ouverture vers les autres et pour ne plus en avoir peur ! Un autre coup de cœur pour cette rentrée littéraire 2019.

vagabondageautourdesoi.com

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