Magistral, intense, « L’Attrape Souci » de Catherine Faye, en mouvances cardinales enclenche le rythme du renom. L’écriture est une éclipse. Ciselée, claire, laconique, elle déporte sur son passage le trop plein et garde pour elle cette part d’un précis hors norme. L’incipit « Je l’ai perdu comme ça. », brouillard métaphorique, corde qui cède face à l’adversité, Rocher de Sisyphe, lance les dés. Le ton est donné. L’Argentine rentre en scène profondément altruiste et magnanime. Car, c’est ici que les saveurs d’une trame douée vont démêler les nœuds d’une omniprésence certaine. « Elle voulait un roman qui se passe au bout du monde, c’est ce qu’elle expliquait maintenant à la vendeuse au chignon plat, dans cette langue qu’elle parlait couramment, l’argentin ». Lucien ne sait pas encore que sa maman n’est déjà plus. Qu’elle a mis « Et un petit enfant aussi, pour le souci….qui n’en est pas vraiment un. » dans la boîte aux soucis paraboliques. Sa mère prépare un bagage de survie pour son fils et son advenir. Ce dernier va devoir passer par l’ombre pour atteindre la cime lumineuse. Le voici pour l’instant dans le labyrinthe argentin à Buenos Aires, errant dans les librairies chimériques, Poulbot abandonné, petit être écartant les branches de l’ibiquité. Lucien, tel le caméléon se prénomme maintenant Lucio, au gré d’une langue courtoise et chantante, petit homme des rues, sans toit, regain en devenir. Les rencontres vont être bénéfiques, signatures accueillantes de cette terre ensoleillée. Les âmes chaleureuses et les combats gagnants seront pour le petit Lucio ce que le jour doit à la nuit. La douleur est vive dans les lignes, mais belle. Elle resserre la solidarité dans le champs des valeurs fondamentales. Arrigo est ce pilier fondateur, une frontière abolie qui ouvre ses bras à l’orée d’une tendresse allouée pour Lucio. L’idiosyncrasie argentine régale les mots d’une saveur mêlée de compassions, de mathé et d’amour. Le lecteur est sidéré de se sentir d’un seul coup aussi vivant, dans cet astre du toujours possible. L’histoire de Lucio est un hymne à la renaissance. « Dessine, Lucio, chaque jour dessine, n’importe comment « maintenant »» Les épreuves surmontées, cet enfant devenu argentin d’adoption déploie ses ailes pour franchir le point gagnant d’un non- retour intérieur. L’Attrappe-Souci métaphore d’une transsubstantiation est un roman soignant, solidaire, sincère, émouvant, fraternel. Une envergure pour la résilience, une gloire aux batailles vaincues et un chant à la virtuosité du courage. Edité par Mazarine , son culte est régénérant.