L'homme qui voulait voir tous les pays du monde
André Brugiroux

City Edition
city editions
octobre 2017
384 p.  8,20 €
 
 
 
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coup de coeur

L’HOMME QUI VOULAIT VOIR TOUS LES PAYS DU MONDE

Pour cette chronique, je dois vous avouer que j’ai préféré attendre deux jours pour la rédiger. Non pas que le livre n’ait pas été intéressant mais, bien au contraire, il est incroyable.
André Brugiroux qui avait « la bougeotte » depuis son plus jeune âge, économisait un peu d’argent afin de se donner les moyens de voyager.
Mais pas un simple voyage, non, il voulait aller partout sur notre planète et quand, enfin, il a réussi à le faire, il est devenu « L’homme qui voulait voir tous les pays du monde ».
Il faut dire que tout jeune, il n’avait pas eu l’occasion de faire ne serait-ce que des petits voyages. Il écrit en page 20 : « Les souvenirs d’enfance sont comme un sac à dos intérieur qu’on ne quitte jamais. Le mien est celui d’un monde en conflit, où j’entends des mots qui effraient les adultes et que je ne comprends pas : « exode, Ausweiss, Papiere, schnell, ’raus’, Gestapo, Kommandantur… » Pas l’idéal.

Il faut signaler aussi que son désir initial était de partir en Arabie saoudite, mais là gros problème car pour la visite de ce pays, il n’y a pas de visa touristique. Par chance, il lui arrive ceci, écrit dans son Avant-Propos :
»Le coup de fil me cueille par surprise. Pourtant, cela fait 37 ans (oui, 37 ans!) que j’attends ce sésame, la précieuse invitation qui doit m’ouvrir les portes du dernier royaume interdit de notre planète : l’Arabie saoudite. L’Arabie est le seul pays du monde à ne pas délivrer de visa de tourisme. Pour le visiter, le voyageur n’a donc d’autres solutions que d’essayer de se procurer une invitation officielle de la part d’un « parrain » vivant dans le pays : Occidental travaillant sur place ou citoyen saoudien (…) En désespoir de cause, des années durant, j’ai traîné partout avec moi et exhibé bien en évidence dans les salons du livre ou à l’entrée des salles où je donnais mes conférences un panneau criant à l’aide : CHERCHE INVITATION POUR L’ARABIE SAOUDITE ! RIEN ! (…)
Au bout du fil, une certaine Selma Matour, jeune étudiante marocaine de Reims que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam et qui n’a jamais entendu parler de moi ni d’aucun de mes livres.
– Oui, mademoiselle, c’est moi
. Voilà des années que je cherche. Je suis désespéré.
– Je peux vous en procurer une. ». (pages 3/4).

Férue de voyages moi-même, je me suis donc lancée illico-presto dans cette aventure (en lisant) et si la critique est difficile c’est d’abord à cause des innombrables péripéties, la multitude de pays visités, les descriptions du manque de moyens financiers (il ne voulait pas dépenser plus d’un euro par jour, nuit comprise ?!?), des souffrances et maladies endurées, à tel point que parfois il doutait de ses capacités de pouvoir continuer… Mais il est toujours parvenu à relever la tête.
Sa façon de voyager aussi est particulière : à pied, en auto-stop, en bateau-stop et même en avion-stop. C’est plus que de la débrouille cela.
Ce qui est incroyable aussi c’est qu’il a presque toujours rencontré une âme charitable pour lui offrir le manger, le gîte et le boire (ah boire ! Comme il en a souffert au point d’être très souvent déshydraté et sauvé in extremis).
Difficile également de parler de ce livre car j’avais mis des post-its presque à chaque page : un grand tri s’est donc imposé et c’est à regret que j’en ai supprimés (mais il me reste l’ouvrage).

Dans ce récit aussi dense car tout, absolument tout est décrit, l’auteur a gardé son humour et a acquis une certaine philosophie de vie : puisqu’il veut visiter le monde sans rien débourser, il va lui falloir compter sur les autres. Il va également en profiter pour apprendre certaines langues étrangères pour se tirer d’affaire un minimum : anglais, allemand, espagnol, italien… ou quelques rudiments.
Inutile d’indiquer les pays visités puisqu’il les a pour ainsi dire TOUS visités. C’est une grande leçon de courage qu’il nous donne car j’allais oublier de le signaler : il a aussi connu la prison – soit volontairement pour dormir dans une cellule libre – soit involontairement à cause de son apparence : cheveux longs pour l’époque, vêtements crasseux ; manque d’hygiène car pas de douche chaque jour ; on le prenait parfois pour un hippie et on le chassait. Mais d’autres logements providentiels se sont présentés à lui comme un coin dans un garage ou une étable, par exemple.
Il faut lire comment il est passé d’un continent à un autre, d’une ville à une autre. C’est époustouflant. Et je n’en raconterai pas plus pour cause de manque de place mais aussi car le but n’est pas de raconter le livre. Et j’aimerais bien pouvoir le faire…

« L’Homme aux semelles de vent » a donc réalisé son rêve, a parcouru au moins 400.000 kilomètres, un périple débuté en 1955 et qui a duré presque soixante ans.
Qui peut mieux dire ou mieux faire ?

Il est à remarquer que ce genre d’expéditions est un peu revenu à la mode, par exemple avec « Nus et culottés » ou « J’irai dormir chez vous ». Est-ce André Brugiroux qui en a donné l’idée ?

Pour ma part, je continuerai mes voyages à ma façon, seule également, et en me débrouillant aussi mais rien a voir avec ce qu’a vécu l’auteur, loin de là et puis ça ne me tente pas. Tiens au fait, il serait grand temps que je pense à mon prochain voyage et j’hésite encore un peu car plusieurs pays se sont présentés à mon esprit, un choix s’impose.
Mon admiration est grande pour le héros et je pense comme lui : à peine de retour je me demande où j’irai la prochaine fois.
Et puis il y a un dicton : « Les voyages forment la jeunesse » (certes, mais certains plus que d’autres ! ).
Ce livre est une belle leçon de vie et qui change grandement d’autres récits de voyages où le confort, les moyens financiers et la logistique sont présents.

Je lui laisse les mots de la fin : « Et maintenant que mon rêve d’enfant est accompli ?… Mon Dieu, ainsi que je l’ai dit, ma soif du monde demeure intacte et je n’ai après tout que 76 ans… Mon plaisir du voyage est toujours aussi intense. Pas blasé, le mec. La beauté, où qu’elle soit, me fait toujours vibrer, comme à 17 ans. (…) Non, tout bien réfléchi, je crois que je vais attendre encore un peu avant de remiser sac à dos et duvet au fond d’un placard. Tant que mes rotules tournent, j’irai ! Je ne veux pas avoir le moindre regret au moment du grand départ… ». (page 180).

Alors un grand Bravo à André Brugiroux qui a déjà écrit plusieurs livres mais pour celui-ci il a travaillé avec Jérôme Bourgine, un grand reporter pour la presse touristique, auteur aussi de plusieurs récits de voyages (entre autres).

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