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coup de coeur
Ambivalence
Suite à un attentat dans un grand hôtel Villa El Mansour de Rabat, Dragan Chenah, géant blond marocain de père et serbe par sa mère, journaliste ou plutôt journaleux à la Houlette Casablancaise voit sa vie remise en question. Il doit déterrer ce qu’il cachait à tout le monde, la tâche qui a fait de lui cet alcoolique, déprimé, blasé, fumeur de haschisch que veut fuir sa femme. A lui de trouver la force de puiser dans sa mémoire et trouver le moyen de soigner le mal qui le ronge et qui fait qu’il ne peut plus écrire une seule ligne ? Oh, non, pas la simple peur de la feuille blanche, mais bien l’incapacité de prendre un stylo et d’écrire. Cet attentat sera le coup de pied au derrière salvateur, l’urgence qui le poussera à tout raconter au docteur Urziz « le docteur des maboules ». A travers ce journaliste blasé, déprimé, alcoolique, fumeurs de joints, Kamil Atimi raconte les relations étroites entre la presse et le régime (les pages relatant la conférence de rédaction du rédacteur de la Houlette est un petit chef-d’œuvre), l’impossible liberté des journalistes, le cynisme des policiers, dont Dragan fut une innocente victime. Les années 63-65 qu’Ilyas raconte à la femme de Dragan et qu’il appelle « la chasse aux gauchos » pour abattre l’opposition et dont sa femme et mère de Dragan fut très certainement victime. L’arrivée des « oulad k’hab » d’islamistes Un premier roman fort au ton ironique et féroce. Une lecture nouvelle où le Maroc n’est pas que la destination des retraités français avec leurs camping-cars, mais un pays en proie à l’islamisation sournoise, un pays où, pour avoir la paix, Dragan se doit de maîtriser le minimum des rudiments d’une religion à laquelle il ne croit pas « Il avait appris à maîtriser les rituels langagiers bordant les relations sociales marocaines. Il connaissait toutes les arabesques, les virgules, les pommades et les enluminures de la phraséologie quotidienne et savait qu’à chaque situation chaque évènement, sacré ou profane, correspondait une formule prête à l’emploi qu’l suffisait de dire au bon moment, avec la bonne intonation et le bon rythme, pour émettre les signaux d’une religiosité de surface, le minimum syndical, à même de lui garantir qu’on lui ficha la paix. » Les Editions Elyzad ont, une nouvelle fois, démontré leurs talents à m’offrir, à nous offrir, de très belles lectures. La couverture, avec ses deux costumes, montre l’ambivalence entre la modernité et la tradition du peuple marocain, le grand écart entre les tenants d’un certain rigorisme religieux et les autres. Retrouvez Zazy sur son blog |
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