La politesse, c’est la vie d’un écrivain en promotion. Si tant est qu’il accepte d’en jouer le jeu. Le narrateur s’y prête, mais tout n’est que désillusion et médiocrité, de la part des journalistes et organisateurs de manifestations qui le reçoivent comme de celle des lecteurs ou des autres auteurs qu’il croise.
Pourquoi, alors, accepter ce qui procure si peu de plaisir ? Pour, faute de mieux, livrer cette Politesse en forme de portrait méchant et drôle d’un monde qui n’est qu’aigreur, ou presque. Et Bégaudeau n’épargne rien ni personne, ou presque, encore.
Qui a quelque connaissance du milieu et de ceux qui le composent s’amusera de reconnaître, derrière ceux dont les noms ont été changés, des individus tout à fait réels.
« A quoi bon noter que les choses sont ce qu’elles sont ? », interroge l’auteur. Il fait de la question une certaine définition de sa littérature, qu’il viendra volontiers présenter à l’occasion de salons dans lesquels « le meilleur catalyseur d’achat c’est la pitié ». Tour à tour triste et féroce, il interroge aussi la complaisance qui sous-tend le milieu, en déplore les enjeux commerciaux et se tire plus d’une balle dans le pied.
« La politesse est la forme acceptable de l’hypocrisie. », écrit l’auteur.
Lui qui identifie si facilement les rebelles en bois ne s’épargne pas non plus, se montrant lâche et amer, et jaloux comme de bien entendu : « Si aucun de ces lecteurs n’existait, je récupérerais leur lectorat. »
Les bleus que Bégaudeau a à l’âme prennent ici toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. A la mise en scène de sa propre personne s’ajoute une mise en abyme de son roman tout juste sorti de l’imprimerie.
Dans une dernière partie, l’auteur se perd en prospectives anarchico-coopératives – et il se peut qu’il perde son lecteur aussi.
Peu importe, on aura bien ri.
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