Le chant du canari
Anne-Frédérique Rochat

Editions Luce Wilquin
smeraldine
août 2015
176 p.
 
 
 
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Anatole et Violaine sont en couple depuis très longtemps. Le temps passe et Violaine aimerait avoir un enfant. Anatole n’est pas du même avis. En guise de réponse à sa demande, il lui apporte un poisson rouge !

Il est vrai que Violaine aime jouer à la sirène en prenant de très longs bains mais c’est pas une raison tout de même. Elle prend ce poisson en grippe, c’est pas très affectueux un poisson et elle l’aide à passer trépas.

Anatole et Violaine veulent se plaire, c’est indéniable. Chacun met de l’eau dans son vin pour que tout se passe bien, pour éviter les conflits. Anatole offrira à Violaine un canari auquel elle s’attachera beaucoup. Mais l’envie d’un enfant devient une fixation pour Violaine et cette fixation changera peu à peu sa vision de la vie, déformera sa réalité. Son imaginaire s’emballera, un malaise entre eux grandira. Perception réelle ou fictive ? le fil est ténu entre les deux.

Le chant du canari, c’est l’obsession de Violaine. En argot du milieu c’est la dénonciation du traître, toute une symbolique. C’est aussi la peur qu’il représente. Le canari était emmené dans les mines jadis pour détecter le grisou, lorsqu’il étouffait c’était le signe qu’il fallait remonter, qu’il y avait du danger.

C’est avec une écriture fluide, humoristique parfois caustique qu’Anne-Frédérique Rochat nous parle de la confiance, des peurs, d’amour, de l’habitude, de la perte de complicité, de trahison et de la folie.
Entre réel et imaginaire, où se trouve la frontière?

J’ai aimé passer un moment avec Anatole et Violaine, j’ai aimé être emmenée par l’auteur là où je ne m’y attendais pas. Un agréable moment de lecture.

Ma note : 8.5/10

Les jolies phrases

Ce n’est pas toujours donnant-donnant, explique-t-il, il faut savoir recevoir sans donner et donner sans recevoir, c’est une des clés du bonheur.

Tu es en pleine forme, tu as mes gènes, tu dois les transmettre à quelqu’un, ton patrimoine génétique ne t’appartient pas, il ne fait que passer par toi.

C’est ma vie, papa, répondit Anatole d’une voix mal assurée, vous me l’avez donnée, et je vous en remercie, mais il me semble que j’ai quand même le droit de la mener comme je l’entends.

Tu n’as confiance en rien ni personne, tu es dans le doute perpétuel, ce qui est aussi fatigant pour toi que pour moi. C’est important d’avoir la foi. En quelque chose, quelqu’un : n’importe quoi.

Vous avez sûrement raison, un enfant doit être l’expérience la plus extraordinaire qu’un être humain puisse vivre, c’est juste que j’ai des peurs mais en réalité je suis comme tout le monde, j’ai envie de transmettre quelque chose, de laisser une trace.

La liberté est une absurdité. Elle n’existe pas. A partir du moment où on vient au monde, on est prisonnier de celui-ci. Prisonnier de la vie. De notre enveloppe corporelle. La seule porte de sortie, c’est la mort. Et encore, ce n’est même pas sûr. Peut-être que mourir, c’est simplement passer d’une prison à une autre.

Que valait-il mieux ? Avoir sa mangeoire remplie tous les jours et être enfermé, ou crever la dalle en liberté ?

On ne réalise pas toujours qu’on nage en plein bonheur quand on se contente de barboter dedans.

Se perdait-on un peu lorsqu’on devenait deux ? Où était-il possible de rester entier tout en partageant son quotidien avec un autre être humain ?

Leurs regards se croisèrent. Et quelque chose s’entrebâilla. Ils laissèrent entrevoir un morceau de leur âme. Leurs solitudes purent s’admirer l’une l’autre, se saluer. Donner la vie, c’est donner un sens à la sienne, c’est être essentiel pour quelqu’un, cesser de ne penser qu’à soi !

La colère, qui était resté très discrète jusqu’ici, commençait à se réveiller, à frémir, gronder, bruire. Comme des braises sur lesquelles on souffle pour que le feu prenne. Il n’y avait pas beaucoup de travail. Le bois était parfait. Ni trop sec, ni trop humide. Il n’attendait que ça, d’être dévoré par les flammes, rongé par l’élément puissant et diabolique. Anatole tenait le rôle du soufflet. Sa respiration, ses mots stupides et maladroits étaient l’oxygène pour l’incendie qui se préparait.

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