Les Pays
Marie-Hélène Lafon

De la Loupe
roman - terroir
mai 2013
230 p.  19,50 €
 
 
 
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coup de coeur

Ancien vs moderne

Nous suivons Claire qui, petite fille, « monte » à Paris avec ses parents pour le Salon de l’Agriculture. Une fois jeune fille, elle quitte définitivement son Cantal natal pour étudier les lettres classiques à Paris. Devenue enseignante, nous la retrouvons à travers le regard de son père.

Marie-Hélène Lafon évoque la vie estudiantine de Claire, du fossé qui la sépare, elle dont la culture est pratique, aux autres étudiants citadins. Elle bûchera comme un paysan sa terre, sans aucune des fioritures que sont le cinéma et autres futilités. « Claire n’allait pas au café, Claire ne se divertissait pas elle ne savait pas le faire et elle n’en avait pas besoin. »

Claire s’est trouvé un pays en la personne d’Alain magasinier à la bibliothèque qu’elle fréquente assidument. Pays, quel joli mot, qui permet de parler à l’autre avec le langage de là-bas. Lui, aura sa mutation loin de cette capitale où il se considérait en transit avant le retour au pays. Claire, elle n’y pense pas. « Elle prendrait avec Alain la mesure d’une distance déjà creusée entre elle et ceux qui, comme lui, continuerait à vivre à l’unisson des parents et amis demeurés à l’épicentre du séisme » Non, elle restera à Paris, même pendant les vacances d’été où elle travaillera dans une banque.

Le Cantal emplit ce livre malgré la vie parisienne de Claire. Mais est-t-elle pour ça devenue parisienne ? Je ne le pense pas, elle devient transfuge car elle n’appartient plus au Cantal, mais n’est pas pour cela parisienne. C’est un livre sur l’exil choisi. Le Cantal est à jamais dans le cœur de Claire qui y retourne souvent.

C’est également le récit, d’une initiation, de l’apprentissage d’un changement radical dans le rapport aux éléments. Du végétal, Claire passe au minéral ; du cake maison au jambon fade, de l’espace à la promiscuité… enfin bref, de la campagne à la capitale. « Elle avait dû apprendre à l’arraché cet entassement de l’immeuble où croissaient, vivaient, s’étiolaient dessus dessous et sur les côtés d’autres corps, que l’on ne connaissait d’abord pas, que l’on frôlait ensuite, parfois, dans l’ascenseur ou dans le couloir. »

Comme dans Tunis Blues, nous avons cette dualité entre l’ancien et le nouveau, la tradition et la modernité. Ici aussi, ils sont étroitement mêlés. Marie-Hélène Lafon parle d’un monde qui disparait ou a disparu : la paysannerie. Je ne parle par des agriculteurs, mais bien des paysans. La réussite de Claire l’éloigne à jamais de la vie que son père a connue.

On pourrait penser que ce livre est ennuyeux. Et bien non, Marie-Hélène Lafon, l’air de rien m’a petit à petit envoutée avec son écriture. Marie-Hélène Lafon, outre son Cantal, a un pays de prédilection : l’écriture. Ses phrases longues sont souples sans jamais être ennuyeuses. J’ai aimé son écriture, son style

Le passage de Claire entrant dans une librairie acheter des livres est une pure merveille, tout comme son travail d’été dans une banque.

Je l’ai découverte lors de l’émission de François Busnel, sur « Les 20 livres qui ont changé votre vie » ; un grand plaisir de l’écouter parler du « Grand Meaulnes » d’Alain Fournier, qui fut mon livre de chevet toute jeune fille et que je garde dans mon cœur. J’ai aussitôt sorti son livre de mes étagères pour découvrir l’auteur. Comme j’ai bien fait !

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