C’est le roman de trois générations, celle de la famille Estienne, des brosses à dents depuis 1845, symbole de la vieille industrie française. Le grand père Raoul vient de mourir en ce début d’année 2013 à « La Banera » , vieille maison de famille gersoise. Son fils J.Michel, a lui, anticipé la mondialisation et a délocalisé en 86 ; Il est divorcé de Chantal de Sainte-Rivière, de vieille noblesse. Ils ont eu trois enfants, Hortense, chef d’entreprise, Lucile, designer à défaut d’être peintre, et Alexandre, qui milite avec sa mère pour le « mariage pour tous ». J. Michel décide de vendre « La Banera », et là, l’auteur avec beaucoup de virtuosité dépeint ces héritiers qui se sont dissous dans l’individualisme, cette génération d’après guerre qui n’a pas ou pas su transmettre l’héritage des valeurs qui se retrouvent pour ainsi dire dévitalisées. Avec cette mort les enfants sont confrontés à la mélancolie de l’enfance ainsi qu’à leurs parents, ce qui donne lieu à de superbes pages. La vie de ces jeunes gens qui veulent tout et vite se fracassera quelque peu à l’épreuve du temps. Avec beaucoup de lucidité, S.Bied-Charreton observe ce petit monde avec dédain parfois mais pitié aussi. La vacuité de la société contemporaine fait réfléchir, elle donne l’intuition de deux mondes parallèles »Le peuple de la mémoire » et le « peuple des immédiats » ; ceux qui connaissent tout de la vie de leurs grands-parents et les autres… Le titre est justifié par cette phrase « Ils n’étaient que des visages pâles, les ombres de ceux qui les ont précédés. » J’ai beaucoup aimé ce roman qui pourrait donner la réponse à Maurice Druon et à ses « grandes familles » Que sont-elles devenues ? Pas très réjouissant certes, mais tellement vrai. On retrouve cette désespérance . à travers toutes les classes sociales d’ailleurs..