critique de "Leurs voyages", dernier livre de Pierre Mora - onlalu
   
 
 
 
 

Leurs voyages
Pierre Mora

festin
les merveilles
novembre 2017
 20 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

C’est un beau livre que nous offre Pierre Mora, publié dans la collection « les Merveilles » aux éditions du Festin. Et un livre ambitieux. Leurs Voyages suit, sur quatre générations, l’histoire de deux familles espagnoles que la dureté des temps a contraintes à venir se réfugier en France pour tenter d’y mieux vivre.
Bordeaux sera leur port d’attache. La communauté espagnole y est déjà nombreuse avant que la deuxième vague d’émigration, celle des Républicains fuyant Franco vienne s’y rajouter. Pierre Mora évoque, avec un grand talent, le courage physique et moral de ces hommes et de ces femmes, déracinés, qui luttent pour s’intégrer à un nouvel environnement sans pour autant renoncer à leur culture. Bel exemple à méditer.
Il y a plusieurs romans dans le livre de Mora et matière à une vraie saga qui s’étalerait sur plusieurs volumes, comme on aimait en lire, au siècle dernier. Mais l’époque a changé ; le temps semble s’accélérer et l’urgence se fait plus prégnante : franchir une frontière par les sentiers des contrebandiers, blesser ses pieds aux cailloux du chemin, surmonter les vertiges des à pic et le froid des névés, n’a plus de sens à l’époque des voyages en avion qui mettent les terres les plus lointaines à portée d’ailes.
Pierre Mora est un conteur, il sait camper de fortes personnalités et les accompagner sur les chemins de l’exil et sur ceux, tout aussi périlleux que suivront leurs enfants et leurs petits-enfants. Chaque itinéraire est prenant et l’on en vient presque à regretter que l’auteur abandonne tel ou tel pour passer à la génération suivante.
Mais cette précipitation qui est celle de notre siècle risque de conduire à une catastrophe. Le rêve de retrouver la lenteur de la marche, les rugosités des sentiers, les aléas des rencontres, de résister à l’emballement fou de la mondialisation financière, pousse Luce à partir, seule, la retraite venue, pour une longue randonnée. Et sa fille Lydia finira sans doute par reprendre une exploitation familiale dans l’Entre-deux-mers, pour échapper à la logique purement matérialiste des grands « producteurs » de vin auxquels elle s’est confrontée au cours de débats dont l’issue était prévue d’avance. Une autre aventure.

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