Les internautes l'ont lu
coup de coeur
nuit blanche
Une véritable pépite.
Maître Kurogiku a quitté son Japon natal à l’âge de 20 ans avec pour seul bagage trois pousses de kózo, un kimono, son secret pour faire du washi et une grue en origami, présent de son père. Il est arrivé en Toscane à la recherche d’une panthère noire, entendez par là une superbe italienne de passage au Japon, signora Tchaó. Il s’installe dans une propriété en ruines, il y a environ quarante ans. Il serait prêt à partir si le propriétaire se manifesterait. Il passe ses journées à méditer devant une feuille de papier chiffonnée. Un jour, Casparo arrive, il bouleversera ses habitudes. Quatre parties composent ce magnifique premier roman. Washi : l’art de faire un papier particulier qui sera déclaré en 2014 patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco. Un premier roman épuré, allant à l’essentiel. Une plume magnifique. Un livre court à lire rapidement pour le plaisir ou un livre accompagnant une vie. Une pépite. A découvrir de toute urgence. Ma note : coup de ♥ Les jolies phrases Toute beauté a sa part d’ombre… L’art de l’origami est un art aux règles simples. Un jour, tout le monde a envie que quelque chose change – cesse. Je cherche à concevoir le mécanisme d’une montre qui contiendrait en elle toutes les complications connues et inconnues. Je veux … je voudrais construire la montre qui puisse contenir toutes les mesures du temps. Je fais sans doute comme vous : je passe mon temps à une activité dont personne ne voit l’utilité. C’est sans doute ce que l’on appelle une passion. Sans doute les êtres et les choses appartiennent à ceux qui s’en occupent. – On ne peut comprendre où l’on va, si l’on ne sait pas d’où on vient. Silence. Regards l’un dans l’autre, comme deux feuilles d’origami pliées l’une dans l’autre. Comme deux fibres de kózo prises l’une dans l’autre. Comme deux engrenages pris l’un dans l’autre. Á quoi sert-il d’avoir si être nous manque. Retrouvez Nathalie sur son blog
nuit blanche
Monsieur Origami… à déplier au plus vite
Cet OVNI littéraire – on ne peut pas vraiment parler de roman – se déguste comme une gourmandise, avec un plaisir intense et avec l’envie d’en reprendre une fois terminé. C’est que Jean-Marc Ceci a trouvé une forme de littérature très originale, à la fois proche du haïku par sa construction codifiée et du bréviaire zen par sa philosophie. Pour le résumer, on pourrait se reporter à la page 20 : « Maître Kurogiku quitte le Japon à l’âge de vingt ans. Avant de partir, son père l’invite au chadò, la cérémonie traditionnelle du thé. Il lui donne un bout de papier plié. Un origami. Il représente une grue. » Si on prend soin de déplier cette page vingt, on y retrouvera tout le livre. On saura que Kurogiku est Maître dans l’art de fabriquer du papier à partir du kòzo, le mûrier à papier, papier appelé washi qui sert à la confection des origamis ; on comprendra que c’est à cause du visage d’une Italienne rencontrée dans son village qu’il décidera de partir ; que c’est un déchirement pour son père de voir s’envoler son fils ; qu’il va alors lui confier ce qu’il a du plus précieux. Après avoir appris tout cela, on peut à nouveau déplier toutes ces histoires pour en découvrir d’autres aspects. On retrouvera alors trois plants de kòzo dans les bagages de Maître Kurogiku ; on apprendra tout de la manière de fabriquer le washi ; on découvrira les règles de l’origami. Des règles simples qui rendent «l’exercice de l’art compliqué». Le déchirement y est, par exemple, interdit ; qu’il existe une légende autour de la grue en origami. On l’aura compris, ce récit peut, en se dépliant encore plusieurs fois, révéler encore bien davantage. Nous entraînant vers la tragédie d’Hiroshima, vers la culpabilité d’un père, vers des rencontres au bout d’un long voyage, vers la façon d’apprendre et de transmettre, vers une philosophie qui nous expliquent que «les êtres et les choses appartiennent à ceux qui s’en occupent.», qu’«on ne peut comprendre où l’on va si l’on se sait d’où l’on vient.» et que cette quête peut prendre toute une vie. En dépliant ce livre, prenez bien soin de goûter à chaque page. Attardez-vous nous seulement à la quête de Maître Kurogiku, mais aussi à celle de son père, de son ami horloger qui aimerait rassembler en une montre tout le temps, d’Elsa qui les accompagne. En fouillant un peu, vous verrez alors un nouveau prodige : de nouvelles connaissances, d’autres émotions apparaissent… accompagnées d’une furieuse envie de relire encore chaque page, de repartir sur les pas de Monsieur Origami. Un livre magnifique de simplicité et de profondeur. Retrouvez Henri-Charles Dahlem sur son blog Ordre et beauté…
Lire Monsieur Origami, c’est entrer dans un autre monde fait de silence et de contemplation, c’est se retirer de la vaine agitation du monde et faire une pause, prendre son temps. Ralentir le rythme pour méditer, profiter de ce que nous sommes ici et maintenant. Une invitation à « être »… « À quoi sert-il d’avoir si être nous manque… » Ce roman, j’allais dire ce poème, d’une grande perfection formelle, raconte la vie d’un homme : Maître Kurogiku. Son métier consiste à fabriquer du papier : le washi. Les branches du kōso, un mûrier, permettent de fabriquer ce papier qui est à la fois souple et très résistant. On peut s’en servir pour créer des lampes, des sacs, des parois japonaises… Fabriquer du washi est un art au Japon et Maître Kurogiku a hérité de son père ce savoir-faire. Mais, s’il vend les moins belles feuilles, il garde celles qui lui plaisent pour se livrer à sa passion : l’origami. Il aime en effet plier le papier. Et surtout, le déplier. Il médite en observant les plis. C’est un art, une philosophie, une façon de concevoir la vie, d’échapper au temps. Un jour, alors qu’il avait vingt ans, Maître Kurogiku quitta son pays avec trois pousses de kōso. Il alla en Italie. Bien plus tard, il rencontre un homme : Casparo, un jeune horloger qui a un projet. Parfois les deux hommes parlent, souvent ils se taisent. Evidemment, Casparo aimerait savoir pourquoi ce maître en origami a tout quitté du jour au lendemain pour aller en Italie. Mais, il sait que « toute beauté a sa part d’ombre », alors il attend le bon moment pour poser sa question… Ce premier roman de Jean-Marc Ceci est un conte poétique d’une grande beauté : chaque mot, chaque virgule, chaque silence est à sa place. La description quasi documentaire de la fabrication du washi est un véritable enchantement : les gestes sont minutieusement décrits et l’on a l’impression de se trouver dans la pièce où l’artisan fabrique le papier. De même, toute la philosophie zen liée au pliage du papier est fascinante. On sort de cette lecture comme apaisé par la beauté du monde et des choses que l’auteur déploie devant nous. L’humour de l’auteur, présent ici et là, achève de nous enchanter… Connaissez-vous la légende des « mille grues » ? Savez-vous ce qu’est « le pli vallée » et « le pli montagne » ? Ouvrez le livre de Jean-Marc Ceci, dépliez-vous et laissez-vous aller… Retrouvez Marie-Laure sur son blog |
|