En référence à IAIN LEVISON, le titre de ce roman pouvait être « les tribulations d’une précaire »
Même connotation burlesque ou déjantée pour aborder sans concession une critique de la société actuelle, celle du chômage et de la précarité.
Mais au féminin.
Sophie, jeune trentenaire, lyonnaise d’adoption, en fin de droit vit de petits boulots, alors qu’elle rêve de vivre de sa plume, de devenir un écrivain reconnu.
Elle essaie de fuir la misère ….qui la rattrape toujours.
Comment est-il possible de vivre avec seulement 40 euros sur son compte ?
Comment vivre en ville avec toutes les tentations quand votre mot d’ordre est débrouille afin d’éviter la dèche.
Sophie raconte sa vie avec drôlerie, un quotidien vaudevillesque rempli de situations cocasses : entre Hector son meilleur ami véritable obsédé sexuel multipliant les conquêtes sans lendemain, sa mère devenue un refuge momentané pour combler sa faim et son manque d’affection et des patrons peu scrupuleux.
Sophie reste toujours digne et discrète sur ses galères.
Elle trouve toujours une solution comme vendre sur le bon coin grille-pain ou bouilloire.
Véritable capharnaüm de fantaisie, calembours et invention de mots, l’auteur nous régale malgré une pointe de mélancolie
Un roman sur les illusions perdues mais résolument moderne et drôle.
Si le titre n’avait pas déjà été pris, on aurait pu intitulé ce roman Les Malheurs de Sophie. Car la vie de l’aspirante journaliste-écrivain au cœur de ce récit très créatif – nous y reviendrons – n’est pas très rose. C’est même tout le contraire. Au moment où s’ouvre le livre, elle est proche de la catastrophe. Chômeuse en fin de droits, il ne lui reste qu’une allocation de solidarité spécifique (ASS) pour boucler ses fins de mois. Mais cette dernière a déjà été mise à mal par les différentes factures (électricité, eau) payées ou restant à payer, si bien que le 20 Sophie n’a plus que 17,70 € sur son compte. Il faut la suivre dans les rayons du supermarché pour comprendre ce que représente ce combat quotidien pour simplement pouvoir manger. Quand prendre un café au comptoir d’un bistrot devient du luxe ou, pire encore, quand l’administration se montre dans toute sa rigidité et son absurdité vis à vis de ses administrés les plus fragilisés. Kafkaïen, mais malheureusement tout aussi quotidien. Rester digne, ne pas baisser les bras. Ne pas avouer à la famille à quel point sa situation est grave. Telle pourrait être l’autre face de ce combat. Car fort heureusement, il reste la famille – la mère et les six frères Martial, Gaston, Virgile, Kazan, Elie, Tom – pour un séjour qui tient de la cure de remise en forme autant que du bain de jouvence. Les quelques jours à Sullac donnent à Sophie l’occasion de revenir sur son parcours et sur les bons moments qu’elle a vécu, avant de retrouver son petit appartement lyonnais et les soucis du quotidien. Avec peut être un moyen de s’en sortir… En acceptant un travail de serveuse dans un bouchon, elle va retrouver au moins pour quelques temps le monde du travail. Ce qui fait toute l’originalité de ce roman – et qui pourra irriter certains lecteurs, reconnaissons-le – tient à la façon dont l’auteur a choisi de mettre son récit en scène. Il y a quelques fantaisies graphiques : polices de caractère, jeux graphiques avec les lettres, typographie sortant du cadre défini, insertion d’un conte pour enfants d’une part, de littérature érotique d’autre part et, de façon beaucoup plus convaincante et drôle, l’arrivée d’interlocuteurs dans le récit qui n’hésitent pas à interpeller la narratrice : sa mère qui n’est jamais avare d’un conseil, son ami Hector qui se plaint du traitement qui lui est réservé et qui exige une scène susceptible de le réhabiliter – il y aura droit – et son éditrice qui ne voulant pas paraître rabat-joie explique qu’«au vu des élucubrations incontrôlables qui émaillent ton manuscrit» il sera difficile d’atteindre des ventes record. N’oublions pas non plus la narratrice elle-même expliquant par exemple, comment elle vient de rater son début de chapitre. Ajoutons enfin Lorchus, le diable qui se permet de sortir de la salle de bain, et le tableau sera complet. Il convient d’ajouter encore quelques prouesses narratives comme l’accumulation d’adjectifs sur près d’une page entière, la collection de métaphores sorties de la boîte à outils de l’écrivain ou encore le recours à l’anaphore (vous savez le «Moi, président… de François Hollande) pour expliquer que tout était normal dans son existence et l’on aura une bonne idée de cet objet dû à une adulte qui n’avait sans doute «pas fait entièrement le deuil de cette époque bénie où vivre dans ce monde, c’était s’en remettre à une longanime et bienveillante main. » Pour tous ceux qui ont envie de sortir de la narration classique, qui veulent s’amuser avec un récit dramatique en soi ou qui ne dédaignent pas le fourre-tout, ce roman aura la saveur d’un bonbon acidulé : très piquant par moments, il n’en reste pas moins joliment sucré. Retrouvez Henri-Charles Dahlem sur son blog
Sophie, une trentenaire chômeuse en fin de droits, vit dans un petit studio lyonnais. Son vrai métier ? Écrivain. Le problème c’est qu’écrire n’a jamais payé les factures –du moins pas pour elle-, et encore moins lorsque l’inspiration peine. Quelques piges de temps en temps viennent renflouer son compte et compléter son RSA, mais rien de bien extraordinaire. Alors qu’elle rivalise d’ingéniosité dans ses petites combines de survie, son estomac crie famine et les factures s’amoncellent.
Isolée dans son appartement, elle cherche des réponses au plafond, réfléchit aux derniers objets qu’elle pourrait vendre sur Internet et surtout, se demande comment mettre fin à cette situation. Mais quand en plus, d’autres voix se mêlent à sa détresse, cela donne un joyeux capharnaüm. Entre un meilleur ami obsédé sexuel qui veut mettre sa voisine dans son lit, une mère inquiète pleine de bonnes recommandations et Lorchus, son démon personnel lubrique, Sophie ne sait plus où donner de la tête et se détourne de son but premier : retrouver un emploi.
Si ce roman reprend des thèmes communs : la précarité, l’exclusion, il rompt cependant avec les codes et les conventions et évite de tomber dans le pathos de la pauvre jeune fille qui ne mange pas car elle ne parvient pas à boucler ses fins de mois. La narratrice n’est pas une vraie prolétaire. Elle appartient à ces nouveaux jeunes chômeurs, victimes de la crise de l’emploi. Sophie a fait de belles études, brillantes, accompli ce que l’on attendait d’elle et pourtant, elle est là à compter ses sous.
Loin de produire un livre revendicatif, Sophie Divry met tout de même le doigt sur une réalité sociale. Quelle place pour l’individu au chômage dans notre société ? Pointé du doigt. Regards accusateurs. L’auteur peint avec justesse la difficulté de confier sa précarité à un entourage pourtant bienveillant et le besoin obsessionnel d’avoir un travail valorisant.
À la fois caustique et sérieux, « Quand le diable sortit de la salle de bain » permet de formuler une véritable critique de la société et de faire réfléchir sans oublier de rire. Entre les multiples listes farfelues, les calembours et les néologismes, on ne cesse de s’amuser. Cette apparente confusion surprend et donne un nouvel éclat à la littérature. Sophie Divry n’a pas peur d’utiliser la page comme un véritable terrain de jeux typographiques et c’est tout à fait rafraîchissant. Elle prouve que l’on peut écrire sur un sujet sérieux sans faire pleurer dans les chaumières, et c’est jubilatoire.
Sophie, jeune lyonnaise d’une trentaine d’années, tente de vivre de sa plume. Autant le dire clairement, elle est purement et simplement au chômage. Dans son minuscule studio elle fait la chasse à toute dépense inutile, attrape des suées à chaque mauvaise surprise financière (que celui qui n’a jamais eu de sueur froide en ouvrant ses régul’ EDF/GDF/Véolia lui jette la première pierre), et cherche des solutions pour se sortir de cette mouise tout en ayant des réflexions complètement déjantées, un meilleur ami queutard, les conseils de sa mère et de son démon personnel Lorchus. L’écriture complètement décalée du roman est absolument exquise : des originalités stylistiques et graphiques, s’ajoutent les pensées, angoisses, questionnements, d’une génération qui à obéit à tout ce qu’on avait exigé d’elle enfant : des bonnes notes à l’école, des longues études, un beau diplôme qui fasse la fierté de la famille et…. le chômage, la précarité, les démarches administratives interminables pour ne pas sombrer avec 15 euros sur le compte en banque dès le 7 du mois. Un roman qui sociologiquement parlant dénonce les désenchantements et les désillusions des jeunes adultes qui ont pourtant tout fait pour rentrer dans les normes de la société et devenir de vrais adultes. Drôle et en même temps criant de vérité sur leurs conditions. Un roman très original qui se termine par un « bonus », comme dans les DVD. Beaucoup d’originalité mais toujours dans la maîtrise. A lire!