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Fenêtre sur cour (bis)
« Tout n’est pas à jeter, dans nos vies. » « Non, tout n’est pas à jeter. » « Il faut juste faire un bon tri. » « Se débarrasser des images corrompues. Des miroirs déformants. » C’est lui qui a voulu s’installer dans ce quartier, en banlieue. Elle a suivi, docilement. Mais elle n’aime pas cette maison. Elle est trop grande et puis tout est automatique. Il faut dire que son mari n’a qu’un mot à la bouche : LA DOMOTIQUE. Chacun sa passion… Elle ne sait même pas se servir du four ni régler la température de la douche. Et puis, le lit est trop profond, la moquette trop épaisse, les écrans trop présents. Double vitrage phonique et thermique. Une vague impression d’étouffer, une vague envie de fuir pour respirer… Ultra moderne solitude… Dans l’immeuble d’en face, un homme reçoit tous les quinze jours la visite d’un travailleur social. Il sort de prison. Il doit bien se tenir, ne pas faire de faux pas. Il paraît que c’est la chance de sa vie. Il prend sur lui pour rester calme et n’étrangler personne. Pourtant, ce n’est pas l’envie qui lui manque. « N’oublie jamais, la meilleure défense, c’est l’attaque » se répète-t-il. Ils lui ont trouvé un travail de cariste. A quatre heures trente-deux, il se réveille. Le quartier dort à cette heure-là. Mais le soir, dans la maison d’en face, il voit une famille heureuse. Cet étalage de bonheur, d’aisance, de facilité est insupportable. Ils n’ont pas posé de rideaux, alors il n’en perd pas une miette, il s’immisce dans une intimité qui n’est pas la sienne, s’introduit par effraction. Il en profite, se fait du mal. Ça le fait hurler, ça le détruit. Les images que lui renvoie la maison d’en face lui donnent la nausée… Aisance, richesse, bonheur, vie facile… Il sent une rage sourdre en lui, emplir son être qu’il a de plus en plus de mal à maîtriser. Et pourtant, tous les soirs, il regarde… Evidemment, on pense à la nouvelle de William Irish Fenêtre sur cour adaptée au cinéma par Alfred Hitchcock dans cette observation quotidienne, minutieuse et obsédante de l’autre en face et dans les analyses que l’observateur ne peut s’empêcher de produire, au risque de devenir fou. Mais les images sont-elles le reflet de la réalité ? Voit-on « ce qu’il y a réellement à voir ? » Ne projette-ton pas plutôt les illusions de notre imagination ? J’ai lu ce roman d’une traite, sans pouvoir m’arrêter, me demandant sans cesse vers quel désastre on se précipitait à coup sûr, à quelle violence les individus auraient inévitablement recours. Un roman troublant sur le thème des apparences, des non-dits, des douleurs enfouies qui refont surface. Vu de loin, c’est toujours joli chez les autres… Retrouvez lucia-lilas sur son blog |
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