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« Tenir jusqu’à l’aube » de Carole Fives est un roman moderne, prenant, jamais sombre. Il y a dans les lignes de l’auteure une lumière au fond du tunnel. Celle qui relève l’amour sur le piédestal du courage et de la ténacité. L’incipit apaise d’emblée le lecteur qui commence son intrusion dans ce huis-clos entre cette jeune femme célibataire et son fils de deux ans. « Avec quelle confiance l’enfant a avalé ses pâtes, ses légumes. » Le lecteur est collé dos au mur dans cette maison où le destin de deux vies devient cette contemporanéité mise à rude épreuve. Comment cette jeune mère célibataire sans revenus stables, sans moyen de garde va-t-elle se sortir de cette impasse ? « Tenir jusqu’à l’aube » est un hymne au souffle de survie. »C’était paraît –il des chèvres indépendantes voulant à tout prix le grand air et la liberté. » Chaque soir ou presque, l’enfant endormi, cette mère tire sur la corde pour dénouer l’angoisse de la solitude. Eprouver sa résistance face aux aléas irréversibles de son contre-jour, où les rideaux tirés se confondent avec les fissures déstabilisantes de sa condition de vie. Combattante, digne cette mère emblématique d’un destin sans croisement dénoue la fureur des diktats sociétaux en bravant les dangers qui feraient d’elle, éloignée du nid, une mère indigne. La grâce d’écriture puissante, souple est une respiration donnée à ce temps de ressources où cette mère si aimante récolte la vie, miettes après miettes pour offrir à l’enfant le miroir d’une normalité plausible. Ce récit se passe dans l’intériorité des êtres écorchés par la vie, marginalisés par les empreintes sociétales déformantes. La subtilité est fervente dans ce roman relevé et tenace. Tout est suggéré et le troisième degré de lecture souligne la formidable et délicate grâce d’un amour hors pair entre une mère abandonnée par le père de l’enfant et son fils trop jeune pour répondre au vide affectif de sa mère. Plus que cela encore cette histoire est une satyre. Le lecteur est secoué. Il a tenu la corde tout au long de ce récit fiévreux et admirable. Fier d’avoir lu les batailles et les victoires de cette mère modèle. « Tenir jusqu’à l’aube » de Carole Fives publié par Les Editions Gallimard l’Arbalète est un roman majeur, poignant, beau et rare qui encense la beauté vraie d’une femme résistante.
L’enfant n’a pas de nom ou bien il porte celui de tous les enfants. La mère non plus n’a pas de nom parce qu’elle ne sait plus qui elle est. Elle n’est plus que la mère, celle qui se lève la nuit lorsqu’il pleure, celle qui berce, console, rassure, raconte, lave, range, nettoie, accompagne, revient, repart, écoute, surveille, nourrit, habille, promène, apprend, montre et recommence chaque jour. La même chose. Toutes les mères sont semblables. Sauf que celle-ci fait tout toute seule, parce que le père est parti. J’allais dire : est-ce que ça change grand-chose ? Non, j’exagère, les pères ont changé, paraît-il. Certains oui. Beaucoup non. Il est facile de le constater. Alors, la mère se met entre parenthèses, elle oublie qu’elle est une femme, qu’elle aime se promener, écouter de la musique, aller au cinéma, rencontrer des gens. Elle travaille (pour gagner de l’argent) pendant que l’enfant dort, ou bien la nuit… S’épuisant doucement… Quand elle consulte des forums parce qu’elle n’en peut plus, on lui rappelle gentiment qu’elle est mère et que l’enfant passe avant. La société lui fait la leçon, la morale. Elle est coupable d’être seule avec un enfant : elle n’a pas su retenir son mari et puis, dans le fond, elle l’a voulu, cet enfant, elle l’a eu, elle doit maintenant se débrouiller avec ! Retrouvez lucia lilas sur Lire au lit |
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