C’est le troisième livre pour cette auteure suisse dont « Chroniques de l’Occident nomade » avait obtenu le prix Nicolas Bouvier du Festival Étonnants voyageurs (2011, Editions Paulette/Zoe). Comme pour son deuxième roman « Les Neiges de Damas », la trentenaire s’appuie sur ses expériences professionnelles passées pour nourrir une réflexion décalée : comment vivre sans Internet ? Ou, plutôt, comment lutter intelligemment contre l’omnipotence du web (la « toile large comme le monde » du titre).
Pénélope, Lu Pan, issus du sérail internet, et quelques autres protagonistes soucieux de redonner un équilibre à leurs vies professionnelles vont tisser les fils d’un piège qui devraient mettre à mal la suprématie du web. Pour freiner cette marche en avant forcée qui leur bouffe le quotidien (horaires de dingue, déconnections impossibles, crises de famille ou de couple quand le fils ou le conjoint sont happés par internet, conscience écolo mise à mal…), June, Birgit, Lu Pan, Pénélope et consorts vont déclencher une panne mondiale dont ils ne mesurent pas tout de suite les implications !
Au-delà d’une réflexion pertinente sur l’importance croissante d’internet, décrite par ceux qui en vivent (tel le développeur réseau ou l’informaticienne), d’interrogations sur le coût écologique de ce phénomène, Aude Seigne construit une fiction drôlement intelligente : « internet est devenu presque gratuit…on parle de droit à la connexion. Et parce qu’être connecté devient aussi naturel que respirer l’oxygène, les gens pensent que c’est immatériel, qu’il n’y a pas d’impact sur l’environnement. C’est un énorme malentendu » explique Birgit à June lors de leurs premiers échanges.
En s’attaquant à internet, les apprentis criminels vont plonger le monde dans une crise sans précédent. Dans leur grande naïveté, aucun des protagonistes n’avait mesuré l’ampleur des dégâts : paralysie internationale, chômage, économies en dégringolades… Que va-t-il rester après ce chaos ? Les incidences sont sacrément perturbantes !