o n l a l u & vu Le livre. La fille du train est cette trentenaire au chômage qui, chaque matin, prétend aller au travail et passe devant son ancienne maison : son ex-mari l’en a chassée pour y vivre avec sa maîtresse. Depuis son train de banlieue, arrêté à un feu, elle espionne ce couple qu’elle blâme pour sa propre solitude noyée dans l’alcool. A l’occasion, elle surprend aussi leurs voisins, incarnation à ses yeux d’un bonheur parfait, d’une harmonie inaccessible. Jusqu’au jour où la jolie voisine est portée disparue. La fille du train croit détenir la clef de l’énigme : elle l’a vue avec un autre homme. Elle témoigne mais n’est pas prise au sérieux. L’auteur ajoute au trouble de la situation en opposant aux souvenirs embrumés de Rachel ceux d’Anna, sa rivale triomphante, et de Megan, la belle infidèle. Chacune porte sa vérité, ses démons, sa culpabilité. L’intrigue se fait plus opaque à mesure que leurs récits respectifs montrent sous des jours moins flatteurs les trois hommes en présence, les deux maris et le prétendu amant… Le film. Récit à trois voix, flashbacks, fausses pistes… la scénariste n’a rien éludé de la complexité du roman, respectant fidèlement sa structure. On pouvait craindre une mise en scène à l’estomac, des effets appuyés, il n’en est rien, ou presque… Fidèle à l’esprit du livre, le réalisateur prend le temps d’installer une atmosphère de malaise quasi claustrophobique. Il développe par petites touches ce qui relie les trois femmes, ce thème sous-jacent qu’on ne peut nommer sans déflorer la fin de l’histoire. Rachel, la plus intéressante car la moins stéréotypée, conserve le même poids à l’écran qu’à l’écrit et l’actrice anglaise Emily Blunt se sort élégamment des pièges de ce rôle propice aux excès. Dans le registre du thriller psychologique sur fond de couple disploqué, dont « Gone Girl » est devenu la référence, ce film apporte une variante sombre et dramatique. Il est bien plus réussi qu’ont voulu l’admettre les critiques et spectateurs britanniques, fâchés que l’histoire ait été transposée de Londres à New York. Un détail. Le public français, lui, qu’il ait lu ou non le livre, pourra se laisser porter par ce suspense intimiste à l’interprétation toujours juste. « La fille du train », thriller américain de Tate Taylor, avec Emily Blunt, Rebecca Ferguson, Haley Bennett, Justin Theroux, Luke Evans, Edgar Ramirez. Durée : 1h53. |
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